La grossesse est terminée prématurément - Récit d'un accouchement particulier
Nous sommes arrivés lundi à l'hôpital de Nîmes pour
cette fameuse écho de contrôle. L'attente n'a pas été longue. Je me
suis installée sur la table et l'écho a commencé. Superstitieusement,
je n'ai pu m'empêcher de mettre mes mains dans mon dos et de croiser
les doigts, mais au fond je savais que c'était fini. Et on l'a vite vu.
Il n'y avait plus le mouvement du coeur.
Le docteur s'est vite arrêté et nous a dit doucement, que la grossesse s'était arrêtée.
J'ai demandé comment le bébé allait sortir. Le docteur m'a répondu "le plus simplement possible". Là j'ai compris que je n'aurais pas de césarienne et que ça allait se faire par voie basse.
J'ai été très rapidement prise en charge. Et dès lundi j'ai pris des cachets pour modifier le col, sachant que l'accouchement allait avoir lieu mercredi. Pour plus de sécurité ils préféraient me garder.
Le gynéco m'a
expliqué que certaines femmes étant rentrées chez elles avaient dû
revenir en urgence et comme j'habitais loin... Il m'a aussi expliqué
quà ce stade de la grossesse l'utérus n'était pas pareil qu'au terme et
qu'une césarienne était plus risquée.
J'ai accepté mon sort, et la voie basse.
Dans l'après-midi je suis montée dans ma chambre. Mon mari est rentré récupérer les enfants, chez la nounou et à l'école, leur annoncer la nouvelle. Et puis attendre mes parents qui allaient s'occuper d'eux pendant cette période.
Je suis donc restée seule à l'hôptial.
Une infirmière est venue me voir, et m'a annoncé qu'en étant à 22
semaines mon bébé allait être reconnu. Le choc fut terrible, je ne
m'attendais pas à ça. Et finalement maintenant je me dis que c'était
très important que ça le soit.
J'ai aussi vu la sage femme, qui elle
a rajouté que j'allais bénéficier du coup de mon congés de maternité.
La vie est vraiment bizarre.
Dans la journée de mardi, Phil me dit que son envie du 3ème est encore plus forte, qu'il le veut vraiment. Je lui dit que moi non, je n'ai pas envie de devoir subir encore ça, c'est trop dur.
Mardi soir, Phil est rentré à la
maison. Nous nous sommes mis d'accord pour qu'il soit tous les soirs à
la maison avec les enfants, pour qu'ils soient le moins perturbés
possible. Mais il a dû revenir parce que j'avais des contractions et
dans le doute il vallait mieux qu'il soit là si ça se déclenchait au
milieu de la nuit.
Les contractions n'étaient pas douloureuses, et elles se sont calmées.
Mercredi matin à 7 h, on me donne les cachets pour déclencher l'accouchement. Et on me descend en salle d'accouchement.
La sage femme qui est restée avec nous toute la journée, nous explique comment ça va se passer.
Ils
ont été parfaits à l'hôpital et on une idée de ce genre d'accouchement
très bien pour la maman. Nous sommes déjà dans une telle tristesse
qu'ils n'en rajoutent pas en nous faisant souffrir avec les
contractions, l'accouchement doit se passer avec le moins possible de
douleurs..
L'anesthésiste arrive et me pose la péri très rapidement,
j'avais des contractions toutes les 2 minutes. Et puis l'attente à
commencer, malheureusement mon col était fermé.
La sage femme nous
dit que ça peut durer longtemps. Pour nous c'est l'horreur, on ne sait
pas comment on va tenir pendant toute cette journée, cette attente, on
ressasse, on pleure, on attend.
On me fait une amniocentèse. Il arrive péniblement à retirer 25ml de liquide, je n'avais plus rien !
Après,
une deuxième vérification et une autre prise de cachet, la sage femme
me dit que le col est toujours fermé, et me dit qu'à 16h et 19h on me
redonnera des cachets.
C'est le désespoir, pourquoi en plus de cette tristesse, doit-on subir une si longue attente.
La gynéco décide de me donner un coup de pouce pour faire ouvrir le col.
1
heure après c'est chose faite, la sage femme décide de percer la poche
des eaux. Elle me dit y'en a pour un petit moment encore.
Je pleure,
je panique, comment je saurai quand le bébé va sortir. Elle m'explique
vaguement, j'ai l'impression de ne pas en savoir plus.
Cependant
elle nous prépare à son arrivée, nous décidons de voir le bébé mais
d'abord qu'elle nous le prépare, nous ne voulons pas le voir tout de
suite. Elle nous explique comment ça va se passer et nous décrit un peu
comment le bébé pourrait être.
Elle sort et nous laisse seuls.
C'est dur. On se dit que bientôt tout va être terminé, cette souffrance psychique, cette attente et on pleure.
Puis je sens quelque chose, je ne dit rien.
Encore un fois, je le dis à Phil qui part chercher la sage femme, puis une troisième fois.
Inexplicable comme sensation mais il se passe quelquechose.
La sage femme arrive, vérife et dit "je vais chercher quelqu'un". Elle sort et laisse la porte ouverte.
Je sens encore qqchose, la tête sort, je crie "la tête est sorti" et 3 secondes après "il est sorti"
Et
là, ce que je ressens est immense, je ne suis plus triste, je suis
heureuse. Je me sens à nouveau mère, j'ai vécu cet accouchement
différemment de vous parce que je n'ai pas souffert, mais j'ai ressenti
un bonheur intense à le sentir passer.
Ce sentiment après coup est
difficile à digérer, je me suis sentie anormale et me suis dit que
j'aurai dû pleurer, mais une sage femme m'a rassuré en me disant que je
n'étais pas la seule à avoir ressenti ça.
Au moment où ce petit être
est passé, je me suis dit "mon dieu, c'est formidable" et me suis même
dit que j'en ferai un 4ème sans problème.
Je me suis excusée plus tard auprès de mon mari tout en lui expliquant ce que j'avais ressenti. Il m'a dit qu'il ne fallait pas, qu'au contraire ce moment pour lui il l'avait trouvé beau. Quand j'ai appelé pour dire qu'il sortait, on sentait dans ma voix de la joie. Et il a trouvé ça très beau.
Nous avons appris le sexe le jour de l'accouchement. Mon mari a craqué et moi j'étais aux anges. C'est vraiment bizarre.
Puis,
on nous a présenté Elie, mon dieu qu'il était beau avec son visage tout
rond. Le portrait craché de son frère Nils. Il était tout petit, 280
grammes seulement.
Je n'ai pas osé le prendre.
Le soir je l'ai
vraiment regretté, nous sommes donc retourné le voir le lendemain, et
nous lui avons apporté une photo de nous 4, pour qu'il ne soit pas seul
jusqu'à son insinération et qu'il sache qu'il fait partie intégrale de
notre famille. Phil lui a présenté son frère et sa soeur à travers la
photo.
Nous lui avons dit aurevoir. Que c'est dur !
Mais après l'avoir revu, nous nous sommes sentis le coeur léger.
Je ne peux cependant m'empêcher de me demander où il est là. Ont-ils fini l'autopsie ? est-il retourné à l'hôpital ? D'ici 15 jours, mon petit Elie sera enfin un ange qui veillera sur nous.
J'ai beaucoup de mal à écrire ce message, je m'excuse si c'est un peu confu et brouillon, ça fait une heure que je suis dessus.
Ce soir, nous avons demandé à Nils s'il avait bien compris pourquoi j'étais à l'hôpital, il a dit non.
Nous
lui avons donc dit que je n'avais plus de bébé dans le ventre car il
était mort et là, sa réaction m'a surprise. Il s'est mis à pleurer.
C'était troublant. Nous aussi nous pleurions, nous lui avons dit que
nous avons de la peine.
Nous lui avons dit que c'était un petit
frère qui s'appelait Elie, il nous a dit qu'il voulait qu'Elie vienne,
qu'il ne parte pas. Et quand on lui a dit qu'un jour il aura un frère
ou une soeur, il était content.
Il a demandé à Phil pourquoi Elie était mort et puis il m'a appelé pour me demander la même chose. Ca va le travailler.
Mais c'était important de le lui dire et d'être franc avec lui.
Liv était présente mais pas très intéressée par notre conversation. Mais elle était là.
Je suis désolée, mon message et très long et je vous remercie si vous l'avez lu entièrement.
Mais voilà des heures et des heures que je ressasse ça dans ma tête en me demandant que ce que j'allais vous raconter.
Je
voulais vous raconter cet accouchement pour vous montrer que dans un
moment très douloureux on peut trouver que la vie est belle et qu'on
pouvait ressentir ce sentiment sans se sentir coupable, et être
complètement normale.
Elie m'a fait le plus beau cadeau en naissant
par voie basse. Grâce à lui j'ai connu quelque chose que je ne
connaîtrai jamais avec un enfant que je mènerai à terme. Et grâce à ça
j'ai l'impression de l'avoir accompagné jusqu'au bout. De l'avoir
soutenu tant que j'ai pu car malheureusement je ne pouvais rien faire
d'autre.
Grâce à lui, Nils et Liv auront un petit frère ou une petite soeur d'ici un moment. Nous nous laissons le temps d'avoir les résultats de toutes les analyses et de l'autopsie pour savoir ce qu'il s'est passé. Si nous savons, car ça peut être un accident, tout simplement. Un événement inexplicable.
D'ici quelques temps nous irons à Nîmes au jardin des souvenirs avec les enfants pour leur montrer où est Elie, leur petit frère.
La vie est dure, triste, on se demande ce qu'on a fait pour mériter cette épreuve. J'ai beau réfléchir, je n'ai pas encore trouvé la réponse, et je cherche surtout en dehors de ça (car on ne mérite jamais ce genre de chose) ce que peut m'apporter cet événement, ce que je dois en retirer.
J'ai
énormément de peine mais ça va se calmer avec le temps. Et malgré tout,
au jour d'aujourd'hui mon coeur de maman déborde d'amour pour mes trois
enfants.
Nous avons commencé à lever la tête avec Phil (mais au fond
nous ne l'avons jamais baissé vraiment) et parlons projet pour le
futur. Le 4ème en fait partie.
Voilà vous avez lu mon histoire ! Et cette histoire même si elle est triste, est pleine d'espoir !
La
vie est ainsi, il y a des moments où on peut rien faire face à son
destin MAIS on peut choisir de faire le nécessaire pour améliorer
l'avenir.